Empreintes

Chez Céleste

Avec toi

Le collier de perle

Dégrafer l'espace

Figures sonores et nus féminin

Son nombre est rose

La deuxième soupe

Mesures

Trajectoires

Maisons grises

Passages

Paysages#1

L'atelier#1

L'un de l'autre

Autour, dedans, avant

En avant

I fell awkward

Rejouissons-nous

Porosité

Pour 15 corps nus

On ne se connait pas

Chaque fois que l'on se lève...

Patrick et Chantal

Propos

L'Abécédaire

Chansons pour le désir

Vidéo

Les effluves d’un temps suspendu

La vidéo est un prolongement de mon corps. Je caresse le corps des autres de plans panoramiques lents et doux. Je touche le réel du regard, ressent le souffle des respirations, tressaille au frémissement des peaux. Plus encore qu’en photographie, les corps sont sans mouvement décisif, ni action programmée : il n’y a pas de déplacement qu’on puisse imaginer précéder ou suivre le moment de la photo. Sujets immobiles sans être figés, mouvement ténu de la respiration, clignement des yeux, frisson des pilosités, emportement des cheveux. Les corps ondulent légèrement, en butte au vent, au froid, à la fatigue d’un muscle, en osmose avec une émotion. Cette vibrante immobilité n’est ni habituelle ni naturelle. Les êtres sont à la lisière d’un espace mental et physique, au bord d’un indéterminé, d’une action, d’un temps, d’une pensée à venir. On ne sait pas. Énigmatique attente. Les postures « de confort » choisies par chacun-e se révèlent quasi sculpturales quoique sans ostentation. Elles exigent de la part des modèles un exercice particulier de concentration, une forte présence à soi et à l’environnement extérieur. Et de l’humilité. C’est faire l’expérience de la conscience du réel au présent. L’enjeu de la qualité du plan – fixe ou panoramique – tient pour beaucoup à la qualité de fixité souple, de droiture détendue, de présence par tous les pores du corps dans l’espace, regard porté sur soi et sur l’infini lointain, dans le temps du plan, que le sujet y soit contenu ou pas, déjà ou bientôt filmé.

Le lieu – paysage, appartement, chantier…– est autant sujet que les participant-e-s. Il vit des herbes qui battent la cadence, des lumières qui enveloppent ou tranchent. Le doigt de l’objectif affleure avec la même délicatesse le parpaing d’un chantier, le cuir d’un canapé, la poussière d’un papier peint fané, le satin d’une peau livide. La vidéo capte les effluves d’un temps suspendu.

Action performative

Pour chaque projet un texte et des dessins viennent scénariser la performance. J’invente des situations, des personnages, des manipulations d’objets, des placements/déplacements de corps… Je réalise des vidéos, des bandes sonores pour leur diffusion. Je fabrique des volumes, des accessoires. Je collecte des végétaux et des objets. La matière accumulée me permet de façonner un espace physique et plastique dans lequel le scénario va être déployé par des personnes généralement nues, amateurs, bénévoles (entre 10 et 18 personnes en fonction de l’écriture et du lieu). La forme performative devient un espace de recherche poétique et ludique où le temps de l’action vient se frotter à la temporalité photographique, à l’arrêt. En effet, si j’entre dans l’espace de la mise en scène, nue, avec un appareil photo sur pied c’est pour arrêter l’action et construire une image. Le public assiste à la fabrication d’une photographie comme s’il était dans un atelier. Je m’adresse aux participants à haute voix, leur demandant de se déplacer un peu à droite, un peu à gauche… Je suis au travail.
Avant la performance, j’envoie les dessins par mail aux participants. Ils visualisent ainsi le déroulé du projet, afin que tous ensemble nous improvisions sur un matériaux commun le temps de la performance.

Pour les participants, la situation est étrangère à leur quotidien. Je les accompagne et les guide tout le temps de la performance. Un temps de répétition est organisé quelques heures avant de jouer la performance, permettant à chacun de se rencontrer, de prendre un peu plus possession de l’espace et du déroulé du projet et ainsi de se sentir un peu plus à l’aise. Les participants explorent des territoires qui leur sont inconnus, ils inventent un vocabulaire, une langue, une façon de s’approprier le geste, le lieu, la nudité. Leur présence face et avec le public crée une forme singulière. Le public est libre de s’installer où il veut, par terre, contre le mur, debout, assis… Il est libre de se tenir immobile, de circuler dans le lieu. Les participants sont libres de quitter la performance à tout moment.